Plus un bruit dans les rues désertes d'Amiens, les pavés brillaient à la douce lumière de la lune et les tavernes étaient fermées depuis quelques temps, on pouvait distinguer encore quelques bruits étouffés au loin, d'un oiseau de nuit.
Skrymir ferma le dernier volet de sa petite maison, il soupira et s'assit quelques minutes sur le petit banc en pierre sous la fenêtre. Il n'arrivait plus à mettre de l'ordre dans ses pensées, alors qu'il avait vendu son champ et dit à tout le monde qu'il partait, il hésitait encore, cette ville qui l'avait accueilli depuis le début, là où il avait tout appris sur son métier et toutes les personnes qu'il avait rencontrées ici.
Chassant ses idées noires, il saisit son baluchon sur son épaule. La miche de pain coincée sous son coude allait très vite le gêner, mais ça pourrait bien l'aider sur la route, il se mit à remonter la rue des Tanneurs et passa par la rue des Orfèvres, il s'arrêta devant la boutique de Marjorine.
Le jeune homme observa la porte, éclairée par l'astre lunaire, baissa la tête et reprit sa marche, songeur.
Il passa la porte ouest de la ville, en faisant le plus discrètement possible, il n'avait pas envie d'avoir de problème avec la garde.
Quelques minutes plus tard, il était sur la route de Bertincourt, laissant Amiens derrière lui. Il avait pensé à ce moment quelques jours auparavant, il aurait aimé partir sans ressentir aucune émotion, mais il se retourna.
Il discerna plusieurs lumières faiblardes s'échappant des chaumières, peut être les boulangers au travail, se dit-il, et puis il laissa ses souvenirs l'envahir. Il repensa à ces derniers jours en taverne avec Fanfan et Perdrinette, à Guntther à qui il n'avait pas pu dire au revoir, à sa filleule, Neoexplorateur, à Marjorine qui le hantait, à Lilly qui lui avait enseigné l'élevage, à tous ceux qui étaient déjà partis et tous les autres amis qu'il avait pu se faire dans cette belle ville d'Amiens.
Il prit une grande inspiration, sécha ses larmes et tourna le dos définitivement à Amiens.